Introduction
Appréhender la préhistoire est, malgré les apparences, extrêmement difficile, ne serait-ce qu'en raison même de sa définition, puisqu'il s'agit de la période et de l'étude de l'ensemble des faits et des événements qui concernent l'humanité avant l'apparition de l'écriture ou de la première métallurgie.
Si l'objet est clair, les limites de la période couverte le sont beaucoup moins du fait de nos connaissances actuelles. En effet, qui peut répondre précisément et irréfutablement à deux sortes de questions-clés : quand et où sont apparues l'écriture et la métallurgie ? Y a-t-il un lieu précis de création, concomitance ou décalage selon les lieux ? D'où une troisième question : quand commence l'Histoire ?
Qui plus est, notre connaissance de la préhistoire est aussi problématique en raison de sa nature et de son développement, ce qui explique notre prise de conscience si tardive, confortée en outre par une interprétation judéo-chrétienne trop littérale du texte de la Genèse, interprétation déjà nuancée, en son temps, par un Origène (185-254), un saint Augustin (354-430) et un saint Thomas d'Aquin (1228-1274). Quoi qu'il en soit, il faut attendre la Renaissance, avec l'émergence d'une certaine pensée critique, la découverte de nouveaux continents, la mise à l'honneur de l'Antiquité grecque et romaine, pour que l'idée germe qu'il puisse y avoir un monde antérieur.
C'est le début d'une aventure chaotique exceptionnelle faite de tâtonnements, de remises en question permanentes, d'interprétations des plus rigoureuses aux plus vulgaires, de fouilles militantes et scientifiques, de découvertes déductives ou dues au hasard absolu.
Des idées révolutionnaires sont alors émises dont celles de l'archevêque James Usher qui, en 1593, à partir d'une étude chronologique de la Bible, parle de la création du monde en 4004 avant Jésus-Christ. Certains, comme Léonard de Vinci (1452-1519), ont une toute autre vision et avancent le concept de durées immenses, voire infinies. Le philosophe italien Lucilio Vanini (1585-1619) suggère même que l'homme pourrait avoir une origine simiesque : il est brûlé pour crime de magie et d'astrologie. En 1735, le suédois Carl Von Linné (1707-1778) médecin du roi, puis professeur, publie Système de la nature et classe l'homme au voisinage de grands singes. En 1762, dans ses Fundamenta fructificationis, il admet qu'il peut y avoir une souche commune pour toutes les espèces d'un même genre, sinon d'un même ordre.
Mais il faut attendre la fin du XVIIIème siècle, et plus précisément le baron Georges Cuvier (1769-1832) pour qu'émerge la science de la paléontologie et Jean-Baptiste de Monet de Lamarck (1744-1829), pour que la première théorie positive de l'évolution des êtres vivants soit élaborée, théorie reprise plus tard par Charles Darwin (1809-1882) et expliquée par l'action directe ou indirecte du milieu, l'usage ou le défaut d'exercice des organes et par l'action des petites variations brusques et spontanées par lesquelles joue le mécanisme de la sélection naturelle.
D'autres initiateurs vont suivre, certains laissant des empreintes indélébiles tels Etienne Geoffroy Saint-Hilaire (1772-1844) qui pose les bases de l'anatomie comparée, Jacques Boucher de Perthes (1788-1868) qui affirme l'existence de l'homme antédiluvien et subdivise, en 1846, dans ses Antiquités celtiques et antédiluviennes, les temps préhistoriques en paléolithique (ancienne pierre) et néolithique (nouvelle pierre), Edouard Lartet (1801-1871) qui donne une des premières chronologies paléontologiques de l'homme fossile. Ces précurseurs, parfois très décriés, avec beaucoup d'autres, dont certains d'ailleurs sont restés anonymes, fondent une nouvelle science : la préhistoire qui, avec le temps, le recours à de nouveaux moyens et méthodes, va s'affirmer, s'imposer, s'affiner.
Comme le livre de la préhistoire ne peut s'écrire qu'à partir des matériaux abandonnés ou laissés dans le sol (armes, outils, os…), fallait-il encore les collecter : c'est ce qui explique que ce soit multipliées à partir de la moitié du XIXème siècle les fouilles archéologiques.
Si on peut retrouver des traces des hommes de la préhistoire sur toute la surface de la terre, la France est particulièrement privilégiée en la matière. C'est d'ailleurs cette richesse, se doublant d'une incroyable diversité, qui explique l'importance du rôle de ce pays tant pour l'établissement des classifications que pour la reconnaissance des différentes cultures.
Certains de ces sites sont mondialement connus en raison de leur dimension, de leur contenu et de leur état de conservation comme la grotte de Lascaux, visitée pour la première fois le 12 septembre 1940 par quatre adolescents, ou les menhirs de Carnac. Il en existe des milliers d'autres dont certains ne sont fréquentés que par les spécialistes les plus pointus et dont les études ont permis bien des découvertes et confirmé ou infirmé bon nombre de théories.
Pour s'en rendre compte, il suffit de les visiter, lorsque c'est possible, de se rendre dans les musées qui sont extrêmement nombreux et, pourquoi pas, de participer à un chantier de fouilles.
Quant à l'histoire, son étude devrait, théoriquement, être plus aisée en raison même de l'écriture. En fait, notamment pour les premières civilisations répertoriées, non seulement ce n'est pas vrai mais certaines d'entre elles nous sont totalement étrangères ou très imparfaitement connues car soit on a pas pu déchiffrer leur écriture, soit que les écrits subsistants sont trop partiels ou peu dignes d'intérêt.
C'est le cas de la civilisation gauloise, qui, si elle a laissé une empreinte réelle et profonde à travers l'Europe, reste, à ce jour, par bien des aspects, très énigmatique.
Si, là encore, l'archéologie s'est révélée précieuse, avec les réserves d'usage en la matière, les écrits, tant des gréco-latins que des irlandais et des gallois, ont été, malgré leur subjectivité et les réécritures, des sources exceptionnelles d'informations pour les historiens et les littéraires.
Quoi qu'il en soit, et malgré les avancées spectaculaires faites depuis deux siècles dans notre connaissance de la préhistoire et des débuts de l'Histoire, bon nombre de questions restent encore sans réponse, notamment celles relatives à l'essence même de l'homme : qui est-il ? D'où vient-il ? Où se situe le ou les chaînons manquants ?
Reynald SECHER
Docteur ès Lettres
Sommaire
LA TERRE
LES ORIGINES DE L'HOMME
LE PALEOLITHIQUE SUPERIEUR
LE MESOLITHIQUE
LE NEOLITHIQUE
LE NEOLITHIQUE EN FRANCE
L'HABITAT
LES CROYANCES
LE MEGALITHISME
LE MONDE A L'AGE DU BRONZE
LES CELTES
LE MONDE DU Xème AU Vème SIECLE
L'EXPANSION CELTIQUE (VIème- IIIème SIECLE)
L'AGRICULTURE ET L'HABITAT
L'ARTISANAT ET LE COMMERCE
LES VILLES, LES VILLAGES ET LES FORTERESSES
LA SOCIETE GAULOISE
LA RELIGION GAULOISE
L'EXPANSION ROMAINE